Je suis cadreur avant tout, j’ai grandi entre la montagne et la mer, entre mouvement et contemplation, j’aime regarder des heures durant un paysage, posésur un rocher ou au cafe, j'aime voir la foule passer dans mon champ de vision, regarder les corps bouger.

J’aime parler et observer un visage en marchant dans une ville, avec le mouvement du monde autour. Si je devais comparer ces deux sensations visuelles à une écriture cinematographique, je dirais que Jacques Tati est un réalisateur assis sur un rocher qui laisse rentrer et sortir dans son cadre les mouvements du monde et que Alejandro Iñarritu, lui, tente de suivre au plus près comme electrisé, à l’epaule ou au Steadicam, les tribulations de ces acteurs emportes dans le flux de la vie.

 

Le Steadicam est un outil ideal pour suivre un personnage et decrire son paysage physique exterieur mais aussi interieur, devenir son regard, il embarque le spectateur dans l’autre, celui qui incarne la vie à l’ecran, l’acteur.

La camera à l’epaule est aussi l'une des manieres de filmer en mouvement, plus en rapport avec ce que notre corps et notre systeme optique peuvent vivre dans la realité. Elle est plus directe, plus chaotique dans son rapport aux autres, mais peut aussi être maniee avec beaucoup de douceur et de fluidité.

 

Les mouvements d’appareils (dolly, grue, voiture travelling, déterminer la ou les positions de camera) generent une energie d’equipe qui m’interesse, car concevoir et reussir un plan avec les machinistes est jubilatoire.

 

Faire un cadre c’est determiner l’outil mais aussi la focale, la distance à laquelle le spectateur sera invité àcontempler les acteurs et les paysages du film.

Faire un cadre c’est decider avec le realisateur et le directeur de la photo, de ce que l’on donnera à voir au spectateur, c’est avant tout servir au mieux la mise en scene, savoir s’adapter à chaque demande puisqu’il y a autant de manieres de faire un film qu’il y a de realisateurs. Les regles sont definies depuis un siecle mais la technique pour moi ne doit jamais frustrer la creativité, à nous techniciens d’aider à l’accouchement d’une idee.

 

Etre Cadreur dans le cinema, c’est avant tout etre un des maillons de la grande chaine qui permet de reussir un plan, pour cela il faut que l’equipe joue le jeu du challenge qui n’est autre que celui de toucher ceux qui, assis dans le noir de la salle, recoivent le son et l’image.